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[Nouvelle] La fin des Briscards
(1/1)
Gary Bobo:
Bonjour à tous !
J'ai fini cette nouvelle il y a peu, je me permet de la poster ici en espérant que vous aimerez. Je suis bien sûr ouvert à toutes les critiques, mais je n'accepterai que les non constructives !
Le sifflement du projectile fendant l'air, puis le fracas de l'explosion lors de l'impact. Des échardes de bois et des morceaux de briques volèrent en tous sens, percutant les murs et brisant les vitres des autres maisons. Tapis dans un bâtiment tout proche, les derniers Briscards frémissaient au bruit de l'impact qui les avaient manqué de peu.
Assis sur les marches du rez-de-chaussée, Mordecai tira de son long manteau de cuir clouté une pipe en terre cuite, qu'il alluma d'une allumette avant d'en aspirer de grandes bouffées de fumée, pendant qu'il observait ce qui restait des Briscards: quelques unes des plus jeunes recrues blotties sous des tables et dans des recoins sombres, ainsi qu'Erik et Grigori, deux vétérans assis sur un tas de gravas. Des cents trente mercenaires qui composaient la troupe, il ne restait qu'une poignée, et pas la meilleure, pensait-il. Les petits jeunes frissonnaient à chaque détonation qui résonnait au loin, puis sursautaient ou émettaient un petit gémissement au son de l'explosion qui suivait. Les Briscards étaient définitivement brisés.
Les tranchées aux abords du Thornwood avaient cédé en quelques malheureuses heures, durant lesquelles les forces khadoréennes massacrèrent la majeure partie des troupes ordiques. Elles cédèrent à la panique à la mort du capitaine Damon, fendu en deux par le Terrible en personne. Le repli se fit dans l'anarchie la plus totale. Mordecai, prenant le commandement suite à la mort de Marcus, son ami et chef des Briscards, tentait de rassembler, dans le chaos, ce qui restait de ses compagnons mercenaires. Il fit une terrible chute lorsqu'une balle, sûrement tirée par un widowmaker, l'avait frôlé, déchirant le côté droit de son manteau.
Mordecai massa son épaisse barbe grise, où son menton douloureux saignait encore. Lorsqu'ils furent revenus entre les murs d'Armandor, Mordecai amena ses hommes dans une maison des faubourgs du marché, près de la muraille sud. Là, ils attendraient le bon moment pour quitter la cité et s'enfoncer dans les bois.
Soudain, une déflagration plus forte que les autres se fit entendre, dominant tous les autres bruits de la bataille qui faisait rage au-dehors. Elle semblait malgré tout lointaine.
- Ils ont percé une brèche dans les remparts ! hurla un des jeunes.
Tous se mirent à paniquer et à crier face à la mort qui semblait venir les chercher.
- Ressaisissez-vous ! hurla Mordecai, sa voix résonnant au-dessus du vacarme. Nous ne mourrons pas ici, prenez vos armes et préparez-vous au combat, nous quittons Armandor.
- Et que fais-tu de notre contrat ? demanda Erik. Si nous désertons, nos têtes serons mises à prix, dit-il en s'approchant de Mordecai, qui lisait la désapprobation dans son regard.
- C'est Damon qui nous a engagé, maintenant qu'il est mort, le contrat ne tient plus, répondit calmement Mordecai. Mais libre à toi de rester, ajouta-t-il tandis qu'il sortait, les jeunes et Grigori sur ses talons.
Ils se retrouvèrent sur une grande place pavée où étaient installés de nombreux étals marchands. La plupart étaient renversé, étalant fruits et légumes sur le sol. À leur gauche, deux maisons plus loin, une bâtisse avait été touchée par un obus, le toit s'était entièrement effondré en un tas de débris, parmi lesquels on distinguait des bras et jambes inanimés.
Puis, une seconde déflagration assourdissante retentit, bien plus proche cette fois-ci. D'énormes débris furent projetés au-dessus du petit groupe qui avait plongé au sol. Derrière eux, Erik sortit précipitamment lorsqu'un des débris de la muraille vinrent s'écraser sur la maison qu'ils venaient de quitter. Erik poussa un cri qui fut brusquement étouffé par les décombres qui tombaient sur lui. Lorsque cette pluie rocheuse cessa, Mordecai, les tympans vibrant toujours, jeta un œil vers la brèche qui venait de s'ouvrir dans le rempart sud, à l'autre bout de la place, et à travers laquelle se déversaient des dizaines de soldats khadoréens.
Mordecai se releva d'un bond et aboya des ordres à ses Briscards qui se relevèrent immédiatement et le suivirent, tandis qu'il courait vers une rue adjacente. Les tirs fusèrent alors qu'ils traversaient la place pavée. Ils se retranchèrent derrière les étals renversés qui fournissaient un couvert acceptable face aux fusils de la Winterguard. Les deux camps s'échangeaient des tirs meurtriers. Deux jeunes Briscards tombèrent sous les balles adverses; un troisième, touché à l'épaule, s'effondra en criant tandis que Grigori se précipitait à son aide. Un obus explosa juste devant Mordecai, projetant de la terre et des pavées. L'un d'eux percuta sa tête, le renversant, à demi assommé.
- Destroyer ! hurla Grigori en pointant du doigt l'énorme warjack d'un rouge flamboyant qui pénétrait sur la place par la brèche, pointant son énorme mortier sur les mercenaires.
Mordecai serra les dents, et au prix d'un gigantesque effort parvint à reprendre ses esprits et à se remettre à couvert, la tempe ruisselante de sang chaud. Il regarda alors le géant métallique qui s'avançait lentement sur les débris du rempart.
- Sur mon ordre, vous lancerez vos fumigènes, puis nous nous replierons vers la rue de l'autre côté ! aboya rapidement Mordecai tandis qu'il désignait la dite rue.
Puis, dans un cri, il leur donna l'ordre de lancer leurs grenades qui atterrirent sur les pavés à quelques mètres devant eux, pour ensuite exploser, libérant un nuage de fumée blanche et opaque, brouillant la vision de l'ennemi. Ils s'élancèrent vers la rue, courant à toutes jambes sans perdre un instant. Alors qu'ils y furent presque tous parvenus, Mordecai jeta un regard en arrière sur Grigori, ses épaisses lèvres crispées par l'effort fourni, tandis qu'il aidait le blessé à traverser la place sous les tirs aveugles des khadoréens. Alors que Mordecai se précipitait vers lui pour l'aider, un obus les pulvérisa, projetant contre lui une jambe ensanglantée. Le choc le renversa une fois de plus et son manteau se gorgea de sang. Il rejeta brutalement le membre amputé, le visage déformé par l'horreur.
Puis il se redressa pour rejoindre ses hommes qui, sans l'attendre, avaient continué à courir. Ils se réfugièrent dans une bâtisse à l'autre bout de la rue. Une fois qu'il les eut rejoints, Mordecai referma la porte derrière lui et avec l'aide de deux Briscards, il barricada l'entrée à l'aide de quelques meubles. Lorsque ce fut fait, Mordecai se rua vers la porte qui donnait sur l'arrière de la maison, l'ouvrant à la volée. Il pénétra dans une petite cour boueuse, avec un arbre en son centre. Mais alors qu'il s'avançait, une demi douzaine de soldats de la Winterguard ouvrirent le feu depuis les fenêtres des bâtisses de l'autre côté de la cour, forçant les Briscards à se replier dans la maison.
Ne pouvant plus sortir, ils cherchèrent une issue. Ils trouvèrent une large ouverture dans le mur qui menait au bâtiment suivant; il leur faudrait en traverser une autre avant d'atteindre celle des soldats khadoréens. Le mur suivant était encore intact. Mordecai compta ses hommes: ils n'étaient plus que quatre, cinq avec lui, l'adversaire en face était en légère supériorité numérique. En faisant un rapide inventaire, il vit qu'il leur restait une dizaine de grenades explosives, ce qui serait suffisant pour percer une ouverture dans ce mur et dans le suivant si cela se révélait nécessaire. Cependant, l'ennemi serait alerté par le bruit de l'explosion.
- Andrey, Grisha, désigna Mordecai. Retournez à la première bâtisse et ouvrez le feu sur l'ennemi, le bruit devrait couvrir les détonations !
Les hommes acquiescèrent et retournèrent en arrière, et bientôt Mordecai entendit les fusils cracher le plomb dans la petite cour. Lui et ses deux Briscards firent exploser le premier mur et se dirigèrent vers le premier étage, où se trouvaient les khadoréens dans la maison suivante. Ils y placèrent les grenades en un tas au pied du mur, puis ils dégoupillèrent la dernière et la lancèrent au milieu des autres. Le mur explosa, projetant un épais nuage de poussière qui masquait les ennemis. Mordecai et ses hommes s'engouffrèrent dans la brèche ainsi créée. Au- delà de la poussière, il tomba sur six khadoréens, leurs visages figés dans une grimace de surprise mêlé de peur.
Tirant parti de leur éphémère tétanie, Mordecai abattit l'un d'eux d'une balle tandis qu'il courait sur le plus proche adversaire. Ses hommes en firent de même et Lev toucha un ennemi en plein cœur, qui s'effondra sans un cri. Le second rata son tir et en reçu un en réponse qui le toucha à la gorge. Il y porta ses mains et tomba sur le sol. Mordecai et le dernier Briscard lâchèrent leurs fusils pour dégainer leurs épées. Mordecai s'élança vers le plus proche adversaire qui avait saisi sa hache et lui portait un coup à la tête. Il dévia la hache, puis, utilisant son élan, transperça le torse du khadoréen jusqu'à la garde, faisant jaillir la lame rouge de sang de son dos.
Lev était pris dans un corps à corps furieux avec un autre khadoréen où l'épée et la hache ne pouvaient être maniées. Serrés l'un contre l'autre, ils basculèrent sur le sol et roulèrent sur le plancher, se donnant de puissants coups dans l'aine ou le visage. Le khadoréen prit alors l'avantage, agenouillé au-dessus de son ennemi allongé au sol. Il poussa un horrible cri plein de démence et brandit sa hache pour lui fracasser le crâne, mais le Briscard profita de cet instant pour saisir son couteau à sa ceinture, et l'enfonça profondément là où se trouvait le cœur du khadoréen. Du sang s'échappa alors de sa bouche et jaillit en une gerbe de sang sur le visage de Lev, tandis que ses yeux plein de démence s'écarquillaient. Poussant alors un cri dément, il abattit sa hache encore et encore sur le visage du jeune Briscard dont il ne resta qu'un amas sanglant de sang et d'os. Puis il s'effondra à son tour, mort.
Mordecai et les deux derniers khadoréens étaient restés pétrifiés face à cet atroce spectacle, plein d'une effroyable démence. Se ressaisissant en même temps que ses adversaires, il fondit sur le soldat khadoréen le plus proche. Il lui porta une estocade, mais celui-ci esquiva d'un bond, puis contre-attaqua d'un coup de hache que le vieux Briscard para de justesse. Le second soldat fonça sur lui sa hache à la main. Encore lame contre lame, il porta un violent coup de botte dans l'aine de son adversaire et se replia un peu plus loin, pour faire face à ce nouvel opposant. Ce-dernier lui porta un puissant coup, que Mordecai dévia. Emporté par son élan, le khadoréen s'étala de tout son long sur le plancher poussiéreux auquel Mordecai le cloua de la pointe de son épée, lui arrachant une exclamation de douleur. Extrayant sa lame, il fit face à son dernier adversaire qui se relevait péniblement, et dont les yeux s'écarquillèrent de terreur à la vue de son compagnon mort derrière le mercenaire.
Mordecai s'élança et frappa son adversaire qui roula de côté pour esquiver le coup. Puis le khadoréen riposta, mais le vieux Briscard dévia l'attaque et lui porta une botte qui, dans un éclair argenté, fit jaillir l'écarlate de la gorge du khadoréen qui s'effondra en émettant un faible gargouillis.
Haletant, Mordecai se montra à la fenêtre la plus proche pour faire signe à ses hommes. Mais, alors qu'il agitait la main pour les prévenir, il entendit des coups de feu. Il se précipita à couvert, mais ce n'était pas sur lui que les balles étaient tirées. Il entendit des cris qui s'échappaient de la maison. Il alla chercher son fusil qui reposait à terre, et retourna à la fenêtre pour y guetter le danger.
Un grand fracas résonna et la façade de la maison vola en éclat. Mordecai vit les corps d'Andrei et Grisha, le visage déformé par l'effroi, projetés sur le mur opposé où ils s'écrasèrent dans un bruit d'os brisés. Un monstre de métal à l'imposante silhouette s'élevait au milieu du nuage de poussière. Le warjack abaissa lentement ses énormes points d'acier cloutés, et s'avança doucement dans la petite cour boueuse, piétinant les décombres de la façade.
- Un Kodiak... la chance ne m'a vraiment pas à la bonne aujourd'hui, pensa Mordecai.
Derrière lui, une silhouette plus petite s'avança, vêtue d'un grand manteau de fourrure, arborant une longue barbe blanche et une hache qui brillait d'une étrange lueur. Le Koldun Lord semblait accompagner et commander le warjack.
Mordecai serra son fusil entre ses mains usées. Puis, dans un mouvement à la rapidité époustouflante, il se mit en joue et tira sur le Koldun. Le projectile le manqua de peu, effleurant sa joue droite et maculant son visage de sang. Portant une main à son visage, le Koldun hurla en pointant Mordecai de sa hache. Les puissants pistons du Kodiak tonnèrent, suivis du grincement de l'acier lorsqu'il s'élança vers le rez-de-chaussée de la maison où se trouvait Mordecai, enfonçant le mur en dessous. Dans le même temps une tempête glacée surgit de la hache du Koldun, et frappa le contour de la fenêtre alors que Mordecai se mettait à couvert.
Il chancela en sentant l'impact de l'acier contre la brique au-dessous de lui. Puis il se mit à courir comme un damné vers la maison mitoyenne, par laquelle il était déjà passé. Alors qu’il enjambait l’ouverture dans le mur, le Kodiak explosa le plancher alors qu'il montait l’escalier pour atteindre le Briscard. Mordecai courut plus rapidement, bandant ses muscles dans l’effort. Il descendit au rez-de-chaussée et traversa le second mur, tandis qu’à l’étage au-dessus, le mastodonte d’acier défonçait brique et charpente pour rattraper Mordecai.
Il se précipita dans la cour boueuse, où le Koldun guettait le mercenaire. Lorsqu’il le vit, il brandit sa hache pour déchainer les vents glacés du nord sur Mordecai. Ce-dernier, bandant tous ses muscles, mit son fusil en joue et fit feu. Le plomb percuta la hache et désarma le Koldun qui, sous la surprise, resta pétrifié. Profitant de cet avantage, Mordecai lâcha son fusil, dégaina son épée et fondit sur son adversaire qui, dans un vain geste de défense, leva les bras devant son visage, tandis que l’épée du Briscard le transperçait de part en part, là où s’était trouvé son cœur. Du sang s’échappa de la bouche du Koldun, souillant sa barbe. Il hoqueta et s’effondra alors que Mordecai extirpait son épée de sa pauvre carcasse.
Mordecai poussa un long soupir, rengaina son épée et ramassa son fusil dans la boue. Le bruit des rouages en branle rappela à son souvenir le Kodiak qui le poursuivait. Le warjack, certes perturbé par la perte de son contrôleur, n’avait rien perdu de sa fureur et chargea Mordecai. Ce-dernier couru à travers la cour, glissant dans les flaques de boue. Il pénétra par le trou qu’avait fait le warjack dans la maison face à lui et la traversa pour rejoindre la rue. Celle-ci était déserte, mais les coups de feu et les cris indiquaient que l’armée du Khador était toute proche. Il couru à l’opposée des bruits du combat qui faisait rage au centre de la cité, se dirigeant vers le rempart sud. Derrière lui le Kodiak explosait la façade de la maison, projetant des débris partout dans la rue, puis lorsqu’il vit le dernier Briscard, il reprit sa furieuse poursuite. Le vieux mercenaire suffoquait sous l'effort, le souffle lui manquant, alors que derrière lui les rouages du mastodonte d'acier grinçaient au rythme de sa furieuse course, broyant les pavées sous ses pas pesants, qui résonnaient comme le marteau sur l'enclume.
Dans de derniers efforts, Mordecai courut, malmenant ses jambes et son souffle qui devenait de plus en plus court, tandis qu’il se rapprochait du rempart sud, le warjack sur ses talons. Lorsqu’il y parvint, il aperçu un peu plus loin: une énorme brèche dans la muraille où aucun ennemi n’était visible. Puisant dans ses dernières ressources, il la rejoint rapidement. En y parvenant, il comprit par quel miracle la brèche était inoccupée : au-delà du gigantesque trou se trouvait le vide et au fond les douves d'Armandor.
Derrière lui, il entendit les lourds pas du Kodiak écrasant les débris. Il l’avait rattrapé. Mordecai était acculé, et jamais il ne pourrait espérer vaincre l’imposante machine. Il scruta désespérément le vide au-dessous dans l’espoir d’y voir une échappatoire, mais il ne vit rien d’autre que les eaux sombres et boueuses.
Mordecai fit face au warjack et lui tira dessus, les balles ricochant sur son épaisse cuirasse d’acier. Le Kodiak émit un puissant grincement métallique, faisant jaillir d'épaisses volutes de fumée noire de ses cheminées. Dans un formidable assaut d'acier, il s’élança à toute allure sur le mercenaire. Mais, lorsque le puissant corps du warjack aurait dû percuter la fragile carcasse du vétéran, ce dernier sauta dans le vide. Le Kodiak, emporté par son élan, tomba également et s’enfonça dans les eaux boueuses pour y disparaitre.
Mordecai rejoignit la rive où il s’allongea, toussant et crachant de l’eau et de la boue. Il soupira, laissant reposer ses muscles en feu, sa tête bourdonnant au son des canons qui crachaient leur plomb sur la cité. Il se releva péniblement, tâtonnant pour saisir son fusil, mais celui-ci avait fini dans les douves avec le warjack. Se baissant pour ne pas être vu, Mordecai observa le champ de bataille. Seuls quelques khadoréens avaient pris position sur une colline, occupés à pilonner Armandor. Le mercenaire traversa furtivement le champ de bataille et s’enfonça dans le Thornwood, laissant derrière lui la cité et la compagnie des Briscards.
Titi:
Hem... je n'ai que deux mois et demi de retard pour la lecture de cette nouvelle... :-\
Mais c'est quand même pas mal du tout ! ;)
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