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LANDES NOUEUSES – TOMBE D’UN IMMORTEL
« le: 16 août 2020 à 22:58:10 »
LANDES NOUEUSES – TOMBE D’UN IMMORTEL

Par Aeryn Rudel

Elyshyvah regarda le soleil de midi et grimaça. Elle s’était rarement aventurée aussi loin au sud, et la chaleur de la fin de printemps était presque intolérable. Devant elle s’étendait un marais qui avait fini par fusionner avec les Landes Noueuses. Ses eaux calmes et saumâtres étaient réchauffées et grouillaient de nuages de moustiques agressifs. Pour une nyss habitué à la glace, au vent et à la neige, le terrain était plus infernal que tout ce qu’elle avait jamais rencontré. Revenant à l’ombre de la lisière de la forêt, elle laissa les branches du chêne noueux la protéger des rayons du soleil.

Derrière Elyshyvah, une douzaine de patrouilleurs nyss s’étaient réfugiés à l’ombre, supportant la chaleur sans se plaindre. Ils, tout comme elle, affichait les bénédictions d’Everblight sur leur chair, mais les leurs étaient bien plus évidentes : des jambes transfigurées leur accordaient un déplacement plus rapide, et des pointes osseuses dépassaient de leurs membres et visages. La corruption d’Elyshyvah était beaucoup plus subtile, avec peu de manifestations au-delà d’un motif de taches violacées qui couraient de la base de son coup au bas de son dos. Comme bergère de bataille, ses dons étaient plus orientés vers ses talents de sorcière et la manipulation des redoutables rejetons draconiques de la Légion.

Le dernier membre du groupe d’Elyshyvah se cachait plus loin en arrière, dans les ombres plus épaisses de la forêt. Le nephilim se tenait silencieux, ses mains griffues serrées autour de la crosse d’une immense arbalète et sa tête sans aveugle se déplaçant lentement d’un côté à l’autre, voyant tout à travers un sens qui n’était pas tout à fait évident.

Le groupe avait voyagé depuis le nord à travers la grande forêt que les humains et les trollkin appelaient l’Olgunholt, en prenant bien soin de passer inaperçue. Les serviteurs d’Everblight avaient de nombreux ennemis si loin au sud, et le petit groupe serait une proie facile pour les bandes bien armées de trollkin et d’humains de la région. Sa petite force, cependant, était assez habile pour entrer et sortit du territoire ennemi rapidement et silencieusement. Sa maîtresse, Vayl, également connue sous le nom de Consul d’Everblight, l’avait choisie elle et ses patrouilleurs pour cette même raison, les chargeant d’infiltrer des zones dangereuses à la recherche d’objets présentant un intérêt particulier pour Vayl – et à travers elle, le dragon Everblight. En raison d’une grande latitude et d’une grande autonomie, liberté qui lui avait permis de récupérer avec succès plusieurs importants artefacts pour sa maîtresse.

Pour mener à bien ses missions, Elyshyvah avait malheureusement souvent du oeuvrer avec ceux qui seraient considérés comme des ennemis dans d’autres circonstances. Tel était le cas actuellement, Vayl avait forgé une alliance avec une sorcière humaine appelée Fiona la Noire, qui connaissait l’emplacement d’un ancien site Orgoth que les deux souhaitaient explorer. Elyshyvah et son groupe de patrouilleurs avaient été dépêchées pour rencontrer l’un des subordonnés de la sorcière humaine. Elyshyvah connaissait peu de choses sur Fiona la Noire, si ce n’est qu’elle adorait la déesse humaine Thamar.

« Elyshyvah », murmura derrière elle une voix profonde et masculine. Elle n’avait pas entendu Ryvar s’approcher, mais elle était soudain très consciente de la proximité du patrouilleur assassin.

Elyshyvah se tourna pour lui faire face, plantant la crosse de son bâton de combat dans le sol devant elle. « Qu’est-ce qu’il y a, Ryvar ? Demanda-t-elle d’un ton glacial.

Clairement plus grand qu’Elyshyvah, Ryvar était grand selon les standards des nyss, même pour ceux affichaient la corruption du dragon. Ses membres étaient musclés et ses mains adroites aux longs doigts étaient tout aussi à l’aise pour manier son épée courbe, tirer avec l’arc recourbé dans son dos ou étrangler un adversaire avec sa seule force. Lui et son partenaire, Kyryl occupaient une position unique parmi les patrouilleurs d’Everblight ; ils formaient une équipe d’assassins compétente chargée d’éliminer des cibles spécifiques choisies par les warlocks du dragon.

« Nous sommes impatients de partir », déclara Ryvar de sa voix basse et chuintante. Le chuintement était un souvenir de bataille des années précédentes, quand un guerrier tharn lui avait ouvert la gorge. « Vayl exige une action rapide dans cette affaire. »

Les doigts d’Elyshyvah se serrèrent autour de son baton. « Je suis consciente de ce dont Vayl à besoin, Ryvar », dit-elle. « N’oublie pas que j’ai servie la Consule avec compétence pendant de nombreuses années. »

« Bien sûr », répondit Ryvar en hochant la tête, un sourire subtil fleurissant dans un coin de ses fines lèvres. « Bien que tu n’aies pas été aussi capable de ces derniers temps. » Il jeta un coup d’oeil à la jambe gauche d’Elyshyvah. Une cicatrice livide y marquait la chair ivoire, juste en dessous du bord de sa jupe en cuir bouilli. La warcaster iosienne Kaelyssa lui avait infligé cette blessure plus d’un an auparavant. Après avoir participé à la destruction d’une forteresse iosienne dans les Pics des Falaises du Tonnerre, Elyshyvah avait suivi Kaelyssa jusqu’à une forteresse naine où l’iosienne s’était réfugié et avait engagée la warcaster dans un combat unique. La récompense de son orgueil avait été une écrasante défaire et une blessure qu’elle porterait le restant de ses jours.

Pire encore, ses patrouilleurs survivants l’avaient extirpée de la bataille et emmenée, faible et honteuse, devant Vayl. La consule d’Everblight ne s’était pas emportée et ne l’avait menacée de douleur et de mort ; Vayl n’avait pas besoin de mesures aussi grossières. Au lieu de cela, elle avait simplement ordonné à Elyshyvah de soigner ses blessures et lui avait demandé de retourner à ses fonctions quand elle le pouvait. Quand, plus tard, Elyshyvah avait rassemblée ses patrouilleurs, elle avait découvert que Ryvar et Kyryl avait été ajoutés à son groupe – leur présence rappelait subtilement que l’échec ne serait pas toléré une seconde fois.

« Retourne dans l’ombre, Ryvar », dit Elyshyvah. « Je ne voudrais pas que tu gaspilles tes forces par cette chaleur avant que j’aie besoin de toi. »

« Selon tes désirs », répondit Ryvar en s’inclinant. « Lorsque tu auras besoin de nous,Kyryl et moi seront là. » Il revint ensuite vers sa compagne, qui était accroupie au pied d’un chêne particulièrement grand et déformé, faisant courir une pierre à aiguiser sur le tranchant de son épée.

Retournant son attention vers le marais, Elyshyvah fut soulagée de voir une douzaine de formes se déplaçant lentement à travers la boue. Un personnage en robe noire, vraisemblablement le représentant de Fiona.

« Melech », cria Elyshyvah à son arbalétrier nephilim. La créature tourna sa grande tête sans yeux vers elle au son de son nom. « Viens à moi. » Il répondit immédiatement et se déplaça pour se tenir à côté d’elle. L’énorme rejeton draconiques la dominait, et sa masse la remplissait de fierté et de confiance.

Elyshyvah resta à la lisière de la forêt, à la vue de tous, laissant les humains patauger dans la boue. Elle n’était pas prêtre à pénétrer à nouveau dans le marais si elle n’était pas obligée. Lorsqu’ils atteignirent le zone qui séparait le marais de la forêt, elle se retourna pour s’adresser à ses marcheurs. « Restez ici. Je veux des arcs en main, mais pas de flèches encochées et ne tirez pas à moins que je n’en donne l’ordre. » Ensuite, elle quitta l’ombre des arbres, suivie par Melech.

Les humains qui s’approchaient portaient des chemises et des pantalons amples et étaient armés de pistolets d’un assortiment d’armes de combat rapproché, principalement des épées à paniers et des haches à manche court. Leur peau était bronzée et tannée à cause d’une exposition au soleil et aux embruns salés de l’océan. Ils avaient l’air maigre et dur, bien que quelque peu indiscipliné. Le chef était habillé de la même manière que les autres, bien que sa tenue soit principalement noire et semble à la fois plus propre et de meilleure qualité. Il ne portait pas d’arme mais un prêtre de la sombre déesse avait probablement d’autres moyens de se défendre.

Le groupe s’arrêta à une douzaine de mètres, et l’homme en noir s’avança seul. Derrière lui, les autres observaient la forme massive de Melech, leurs mains s’attardant sur les crosses de pistolets et des poignées d’épée. L’homme en noir semblait complètement impassable face au nephilim, et il marchait d’un pas rapide dans la direction d’Elyshyvah.

Les cheveux foncés du thamarite étaient coupés court, sa barbe avait été soigneusement taillée autour sa bouche et de son menton. Son front était large et dégagé, et ses yeux brillaient d’un bleu vif qui lui rappelaient le ciel clair du nord. Elle supposait qu’il était avenant selon les normes que les humains jugeaient de telles choses.

« Vous êtes Elyshyvah ? » demanda l’homme en Aeric, son accent barbare trahissant sa méconnaissance de la langue. « Quelles langues pouvez-vous parler ? »

Sa maîtrise des langues humaines était limitée, mais elle avait une connaissance pratique du khardique et du cygnaréen. Elle choisit ce dernier, car l’homme n’avait pas l’air du nord. « Je suis elle », dit-elle.

« Je m’appelle Garrus », répondit-il, également en cygnaréen. « Ma maîtresse m’a demandé de vous donner ceci. » Il tendit un morceau de parchemin plié, qu’Elyshyvah prit et ouvrit. Sur le parchemin était griffonné le symbole que Vayl lui avait dit d’attendre : des flèches tripartites sur un champ noir. C’était le symbole de la déesse Thamar, la divinité que Fiona servait. C’était aussi le signe que c’était le représentant choisi par Fiona.

Elsyshyvah hocha la tête et rendit le parchemin à Garrus, qui le rangea sous sa robe. « Tu nous emmèneras au tombeau », dit-elle.

« Je le ferai », répondit Garrus, « tant que vous comprenez les termes. »
« Les conditions n’ont pas changé », dit Elyshyvah, en se hérissant. « L’épée appartient à ta maîtresse, le tome à la mienne. » Elle posa une main sur l’avant-bras massif et écailleux de Melech. » Je respecterai l’accord aussi longtemps que tu le feras », dit-elle.

« Bien », répondit Garrus, ignorant la subtile menace d’Elyshyvah. « Alors, continuons. »

* * *

Garrus marchait à quelques pas derrière la femelle nyss et l’imposant rejeton draconique à côté d’elle. Ses guerriers, qu’elle avait appelés « patrouilleurs », se déplaçaient devant elle, dans la direction qu’il lui avait indiquée sur la base des notes codées que Fiona lui avait fournis. Ses propres hommes suivaient derrière lui en une ligne irrégulière. Ils marchaient côte à côte en petits groupes de trois ou quatre avec toute l’habilité que l’on pouvait attendre d’hommes plus habitués aux ponts roulants d’un navire qu’à l’enchevêtrement des profondeurs de la forêt. Pourtant, les chiens de mer avaient été triés sur le volet parmi l’équipage du Mauvaise Fortune, le propre navire de Fiona, et il savait qu’ils étaient maîtrisaient les pistolets, les épées et les haches qu’ils portaient.

Elyshyvah ne s’était plus exprimé depuis que les deux groupes avaient commencé à se déplacer vers le sud, vers leur but. Elle et ses « hommes » semblaient assez sauvages. L’effet de la corruption du dragon sur leurs corps l’intéressait cependant, et il se réjouissait de la rare occasion de l’observer de près.

Le rejeton draconique que les accompagnait était encore plus intrigant que les nyss que les nyss corrompus. Garrus savait qu’il était probablement l’un des rares humains de l’Immoren occidental à s’approcher si près de l’un des bêtes et à en vivre pour en parler. Humanoïde, il se tenait sur deux larges pattes griffues, et ses longs bras nerveux se terminaient par des mains à quatre doigts. Le rejeton draconique tenait une arbalète de la talle d’une petite baliste, indiquant à Garrus qu’il possédait un intellect au-delà de celui d’une simple bête. C’était une créature fascinante, et il n’aimerait rien de plus que de l’étudier plus en détail- de préférence sur sa table de vivisection.

Garrus reporta ses pensées sur la tâche à accomplir. Fiona lui avait confié avant tout le soin de rechercher le tombeau orgoth et de récupérer Harrowdim, la légendaire lame réputée y être enterrée. L’intérêt de Fiona pour la lame était compréhensible ; la magie déchue des orgoth était irrésistible pour quiconque cherchait à mieux comprendre l’occultisme. Il était honoré qu’elle l’avait choisie pour accomplir cette tâche.

Finalement, le terrain se retrouva complètement dépourvu de vie. Garrus fonça les sourcils, perplexe. Rien de ce qu’on lui avait dit ne l’avait amené à s’attendre à ce genre de dévastation. Sous leurs pieds, le sol craquait et crissait alors que leur pas réduisait les couches de détritus en poudre grise. Il jeta un coup d’œil à la cheffe nyss et vit que son expression était sombre.

« Que s’est-il passé ici ? » demanda-t-elle en cygnaréen, jetant un œil au paysage silencieux et mort.

« La puissante magie nécromantique des orgoth pouvait affaiblir et tuer des êtres vivants », répondit Garrus en s’approchant pour se déplacer à ses côtés. « mais je m’attendais à ce que de telles énergies se soient estompées depuis longtemps… » Elyshyvah hocha la tête, mais son expression demeura sombre et ils continuèrent en silence.

Le groupe émergea bientôt dans une clairière de terre crayeuse d’où les souches d’arbres depuis longtemps morts se dressaient telles les dents pourries d’une grande bête décrépie. Au centre s’élevait un large monticule de pierre et de terre entouré de six piliers gravés de runes, chacun mesurant environ 3 mètres de haut et semblant être de construction plus récente que l’antique tumulus. Un côté de la tombe était dominé par une ouverture sombre, délimitée de pierre noire et si grande qu’elle aurait pu facilement accueillir quelque chose la hauteur d’un homme et plusieurs fois sa largeur. L’énorme dalle de pierre qui aurait dû sceller la tombe gisait sur le sol à proximité. La femelle nyss grogna, et Garrus lui-même ressentit une pointe de consternation en remarquant que le sceau avait été brisé.

Elyshyvah fit un geste à son groupe et les patrouilleurs prirent position autour de la clairière, brandissant leurs arcs plutôt que leurs courtes et courbes épées. Le rejeton draconique resta près d’elle. Garrus plaça ses propres hommes plus près du monticule et se déplaça ensuite pour examiner de plus près l’un des monolithes.

L’observant, Elyshyvah demanda : « Et ces piliers ? Ils ne sont pas orgoth. Reconnais-tu les runes ? »

Garrus fronça les sourcils. « Ils sont le fait des trollkin. Une mise en garde, peut-être, ou une sorte de gardien. »

« Gardien ? Vont-ils nous barrer le passage ? »

Garrus secoua la tête. « Je ne pense pas ; ils sont probablement destinés à limiter la propagation de toutes les énergies persistantes ici.
Elyshyvah hocha la tête avec raideur avant de s’éloigner pour discuter avec l’un des patrouilleurs, un grand mâle que Garrus avait remarqué se tenir à l’écart des autres.

« Yorvek », cria Garrus en direction de son groupe de chiens de mer Un homme à la peau sombre, avec des pistolets en bandoulière sur la poitrine, se redressa devant lui. « Nous allons pénétrer, Bosco », dit Garrus. « Je veux que les torches soient allumées et les armes prêtes. Choisis deux hommes pour monter la garde. »

« Oui », répondit Yorvek avant de se retourner vers ses hommes.

Garrus tourna son attention vers Elyshyvah et vit qu’elle avait donné des ordres similaires aux siens. La plupart des patrouilleurs et son rejeton draconique se dirigeaient vers l’ouverture du tumulus ; les deux derniers se tenaient à la lisière de la clairière. Le grand mâle avec qui elle avait précédemment parlé lui tendait une torche allumée ; il semblait rester derrière.

« Je suis prête », dit Elyshyvah en s’approchant du monticule. Elle désigna l’entrée avec son bâton à lames. « Tu iras en premiers. »
Garrus fit une grimace face à son évidente méfiance. Lui-même n’était pas très heureux à l’idée d’avoir dix nyss corrompus et un rejeton draconique dans son dos alors qu’il descendait dans une tombe sombre et hantée, mais il doutait qu’Elyshyvah le trahisse avant qu’ils n’aient complètement exploré le tumulus. Il était beaucoup plus préoccupé par la possibilité de pièges orgoth.

Eh bien, il devrait juste en tirer le meilleur parti. Les nyss risquaient de faire trébucher quelque chose par leur ignorance, et il ne pouvait pas prendre le risque.

« Très bien », dit-il, « mais c’est vital pour vous et les … vôtres de suivre mes instructions. Les orgoth n’apprécie pas les intrus. Il s’empara d’une torche allumée par Yorve et la tint en l’air. La lumière diffusée révéla un passage abrupt de pierre lisse et travaillée qui menait sous terre. L’air vicié et moisi qui flottait des profondeurs de la tombe sentait légèrement la pourriture. « Restez derrière moi », dit-il à ses hommes par-dessus son épaule en franchissant le seuil dans l’obscurité.

* * *

Elyshyvah envoya son rejeton draconique derrière les humains et le suivit dans les ténèbres. Forcément, elle put entendre ses griffes cliqueter sur le sol de pierre ; il n’avait pas besoin d’une torche pour les voir. Ses patrouilleurs la suivirent, progressant prudemment dans un environnement artificiel.

Le cortège avançait lentement, un rythme déterminé par la progression prudente du prêtre en tête. Elyshyvah étudia les murs du couloir descendant régulièrement tour en progression. Ils étaient nus pour la plupart, mais elle apercevait parfois ce qui ressemblait à des runes trollkin gribouillées dans la pierre. D’autres endroits montraient des visages finement sculptés, méfiants et démoniques. Ils faisaient partie d’un motif général qu’elle savait être associé aux ruines et aux artefacts orgoth.

À plusieurs reprises, le groupe tomba sur des squelettes éparpillés dans le passage incliné, suggérant une intrusion plus récente. À ces occasions et à plusieurs autres, le prêtrs thamarite ordonna aux autres de s’arrêter pendant qu’il examinait les murs et leurs marques. Semblant connaître les chemins orgoth et leurs pièges, il les mettait en garde contre le fait de marcher sur certaines pierres. À plusieurs reprises, il enfonça ses doigts dans des ouvertures presque invisibles, provoquant des grincements à l’intérieur des murs, désactivant ainsi toutes les mortelles surprises qui auraient pu leur arriver.

Après une longue période d’obscurité éclairée par les torches, Elyshyvah remarqua une lueur devant elle. La lumière jaunâtre augmenta progressivement en intensité, débordant dans le passage et projetant d’étranges ombres déformées sur les murs. En approchant, elle se rendit compte que cela émanait d’une grande chambre ouverte au bout du passage.

Garrus et ses hommes pénétrèrent dans la pièce sans hésitation. Elyshyvah souleva sa main droite et leva son index et son majeur. Derrière elle, elle entendit les patrouilleurs répondre à son signal en rengainant leurs épées et en décrochant leurs arcs. La chambre devant elle semblait assez grande – assez grande pour permettre le tir de projectile.

Alors qu’Elyshyvah se déplaçait dans la chambre circulaire, elle fut stupéfaite par sa taille. Bâtie entièrement en pierre taillée et s’étendant sur des dizaines de mètres de diamètres, elle s’enorgueillissait d’un plafond en forme de dôme qui s’élevait à dix mètres ou plus. Le plafond était couvert d’étranges sigles et d’autres visages bestiaux qu’elle avait remarqué dans le passage. Une massive fosse contenant un grand feu dominant le centre de la pièce, ses flammes d’un jaune vif brûlant avec une luminosité anormale et sans combustible apparent.

Bien que largement vide, la chambre comportait un trône de pierre noire monumental reposant une estrade surélevée directement en face l’entrée, au nord. Dispersés devant le trône se trouvaient les restes brisés de dizaines de squelettes. La plupart d’entre eux tenaient encore des armes en fer rouillées ou des grossières armes en pierre et étaient recouverts de restes de vêtements ou d’armures en lambeaux. Sur le trône se trouvait le cadavre momifié d’un grand homme vêtu d’une armure d’acier élaborée. Une épée nue reposait sur ses genoux.

Garrus et ses hommes avaient commencé à s’approcher du trône, se tenant à l’écart du foyer. Avec Melech derrière elle, Elyshyvah suivit. Ses patrouilleurs s’étendirent le long du périmètre de la chambre, arcs à la main et flèches encochées.

À l’approche du trône, Elyshyvah put discerner plus de détails sur l’antique armure portée par son occupant. Elle ressemblait décidément à celle des orgoth. Cuirasse, cretons et avant-bras portaient tous des visages humanoïdes grotesques, étrangement allongés pour s’adapter à la pièce d’armure qu’ils ornaient chacun. Un casque conique à face ouverte, avec des cornes en acier torsadées, était posé sur la tête inclinée du cadavre.

Lorsqu’Elyshyvah rejoignit Garrus devant le trône, il pointa du doigt la grande épée qui reposait sur les genoux du guerrier orgoth et dit : « C’est Harrowdim. » L’arme à un seul tranchant ressemblait à un fauchon à deux mains. Des visages bestiaux hurlants se mouvaient et se tordaient à la surface de la lame, leurs visages torturés brillaient d’un léger vert acide.

« Alors, prends-la », répondit-elle.

Garrus secoua la tête. « Je ne pense pas que ce sera facile », prévint-elle. « Harrowdim est un prix trop important pour ne pas être gardé. » Il regarda le trône et le personnage qui s’y trouvait, perdu dans ses pensées.

Elyshyvah regarda les restes squelettiques devant le trône. Ils portaient tous les signes révélateurs d’une mort violente : côtes fêlées, crânes brisés et armes fracassées. La plupart étaient clairement là depuis de nombreuses années, mais des lambeaux de chair desséchée s’accrochaient aux os de quelques-uns, indiquant une mort plus récente. L’un des squelettes était plus petit et plus fin que les autres, et il tenait n massif volume recouvert de cuir teint en bleu profond. Ses yeux se fixèrent sciemment sur sa surface, mais elle ne donna aucun signe extérieur d’intérêt.

La voix de Garrus ramena son attention sur le trône et l’épée. « Je ne vois aucun signe barrières ou de pièges. Il doit y avoir un gardien. » Il se retourna et scruta les murs, mais son froncement de sourcils indiqua qu’il ne voyait pas plus de signes d’une autre entrée qu’elle.

« Un gardien, nous pourrons nous battre », dit-elle sans ambages. « Comment le trouver ? »

Garrus la regarda de façon égale, un sourire prédateur sur les lèvres. « Nous l’attirons. »

Il se tourna vers ses hommes, qui se tenaient à une courte distance et désigna un homme aux cheveux clairs près du seuil de la chambre. « Toi », cria-t-il. « Prends l’épée. » Le chien de mer hésita, puis jura alors que ses compagnons le regardaient avec des visages sombres. Il se dirigea vers le trône, le pistolet levé, essayant de ne pas marcher sur les squelettes qui s’amoncelaient devant lui.

Lorsqu’il atteignit le trône, l’homme tendit une main et lova ses doigts autour des bandes de cuir usés de la poignée de la grande épée. La sueur perlait sur son front. Il leva l’arme et un sourire se dessina sur son visage hâlé.

L’épée à la main, il se tourna et repartit vers Garrus. Il fit exactement trois pas avant de s’arrêter brusquement, ses traits se tordant d’agonie.

« Regardez la lame », chuchota Garrus.

Les visages se tortillant sur la longueur de Harrowdim étaient devenus beaucoup plus brillants. Leur illumination sinistre avait pris une qualité presque tangible, s’insinuant dans le bras du chien de mer telles des vrilles d’un éclat émeraude. L’homme tomba à genoux, les traits tirés par une évidente douleur alors que la terrible lueur verte enveloppait rapidement tout son corps.

Elyshyvah regardait avec une morbide fascination sa chair commencer à se flétrir, s’effondrant autour de ses os comme si la flamme verte qui brûlait son corps lui prélevait la vie. Sa bouche était ouverte et s’étendait de plus en plus à mesure que la peau devenait de plus en plus fine et tendue sur son crâne. Ses yeux se ratatinaient dans leurs orbites, s’effondrant vers l’intérieur avant de disparaître complètement. Remarquablement, il resta effroyablement vivant alors que l’épée aspirait avidement la vie de sa chair. Même après que l’homme ait été réduit à rien de plus qu’une enveloppe, il tremblait encore faiblement, les doigts grêles lovés autour de la poignée d’Harrowdim. Finalement, l’homme s’immobilisa et l’épée échappa à sa prise et claqua sur le sol de pierre.

L’épée brillait violemment et le rayonnement atteignit une intensité fulgurante qui obligea tous les personnes présentes dans la pièce à se protéger les yeux. La douloureuse illumination s’est lentement atténuée et fini par s’éteindre comme une bougie soufflée par le vent.

Elyshyvah retira son avant-bras de ses yeux et par réflexe lova ses doigts autour de son bâton de combat. Elle vit immédiatement que les humains avaient pointé leurs pistolets sur le trône et ses patrouilleurs avaient bandé leurs arcs, des flèches barbelées scintillant à la lueur des flammes. Melech siffla et leva son arme.

Le cadavre orgoth n’était plus un cadavre. Il se tenait devant le trône, la peau de bronze visible à travers les interstices de son armure. Le visage, sous le heaume, avait une allure noble, avec une large mâchoire, un nez crochu et des yeux enfoncés couleur d’onyx.

Le guerrier s’avança lentement et s’abaissa devant les restes du patrouilleur pour récupérer Harrowdim. Son mouvement fut suffisant pour briser la tension meurtrière dans la pièce. Le claquement sourd des cordes des arcs des patrouilleurs frappant les canons d’avant-bras en cuir retentit et fut rapidement suivi par le rugissement tonitruant des pistolets des chiens de mer. Une grêle de flèches et de coup de pistolet frappa le guerrier, le repoussant de plusieurs pas jusqu’à la base de son trône, mais ils tombèrent au sol dans une litière d’hampe brisée et de boules de plomb aplaties. La fusillade de projectiles semblant avoir eu peu d’effet.

Le tonnerre des coups de feu céda la place à la fureur désespérée du rechargement alors que les chiens de mer enfonçaient de nouvelles cartouches dans leurs armes.

Les patrouilleurs continuaient à tirer, encochant de façon régulière les flèches, tirant encore et encore.

Le guerrier orgoth souleva Harrowdim et sa large bouche se fendit en un sourire sauvage. Soudain, le bruit vif de l’arbalète de Melech remplit la pièce. L’énorme projectile heurta la cuirasse du guerrier, le renvoyant contre le trône. Le projectile avait pénétré l’armure et la chair derrière, laissant près de 60 centimètres du projectile empenné dépasser de son corps.

L’orgoth récupéra instantanément son équilibre. La rage sombre qui remplissait ses traits aquilins était antique et terrifiant. Il tendit une main, arracha le projectile de sa poitrine et le jeta. Ensuite, il s’empara d’Harrowdim à deux mains et disparut.
Un battement de coeur plus tard, Elyshyvah entendit Melech hurler. Elle se retourna pour voir le rejeton draconique à genoux devant le guerrier, le sang noir coulant d’une gigantesque blessure à l’abdomen. L’épée orgoth jaillit, et la tête du nephilim se détacha de son corps dans un jet de sang.

Une rafale de coup de feu de représailles suivit la mort de Melech, mais le guerrier disparut à nouveau. Elyshyvah lâcha sa torche et se retourna sur place, tenant son bâton de combat devant elle dans une position protectrice. La pièce entière avait éclaté en une cacophonie de voix nyss et humaine criant de confusion et de rage.

Le guerrier réapparut au milieu d’un groupe de chiens de mers, son épée dansant : une, deux, trois fois. Puis il disparut. Quelques secondes plus tard, il réapparut de l’autre côté de la chambre, à côté de deux patrouilleurs, et Harrowdim assouvit sa soif de carnage sur la chair des nyss. Les flèches des patrouilleurs et les tirs de pistolets des chiens de mer s’écrasèrent contre le mur alors que le guerrier disparaissait à nouveau.

Le silence régna un instant, puis l’orgoth réapparut sur son trône, Harrowdim se reposant à nouveau sur ses genoux. Des ruisseaux de sang coulant lentement le long de la lame gorgée de sang et sur les jambes armurées du guerrier avant de s’écouler sur le sol en pierre.

Les pistolets des chiens de mer et les arcs des nyss pointèrent vers le trône, ce qui poussa Elyshyvah et Garrus à crier presque à l’unisson dans leurs langues respectives : « Ne tirez pas ! »

Le guerrier orgoth fixa les personnes devant lui, ses yeux noirs étincelants. « Vous osez vous immiscer dans ma cour ? Demanda-t-il d’une voix retentissante, remplissant chaque espace de la colossale chambre. « Présentez vos respects devant ce trône ou vous souffrirez pour votre témérité. » Il s’exprima en cygnaréen, mais avec un accent qu’Elyshyvah n’avait jamais entendu.

Garrus s’avança et s’agenouilla devant le trône. « Pardonne notre intrusion, Excellence », dit-il, la voix tremblante. « Nous ne recherchons pas à susciter votre colère. »

Le regard du guerrier orgoth se tourna vers Elyshyvah. Elle sentit son poids sur elle comme une chose tangible, une malveillance sombre et étouffante. « Et vous, palote ? » Demanda-t-il. « Trop hautaine pour s’agenouiller devant meilleur que toi ? »

Elyshyvah inclina la tête. « Moi aussi, je ne veux pas manquer de respect, mais je ne peux pas m’agenouiller devant ce trône », dit-elle ; se demandant si ces paroles seraient les dernières. « Ma fidélité appartient à quelqu’un de plus grand que vous. »

« Plus grand que moi ? » Le guerrier rejeta la tête en arrière et rit. « Vous avez de la volonté, esquimau. J’admire ça chez un esclave. Agenouillez ou debout ; cela ne fait aucune différence pour moi. »

« Garrus se releva. « Je m’appelle Garrus », dit-il. « Celle que je sers m’a envoyé traiter avec vous. Ce qui nous a amenés à votre … salle. »

« Qu’est-ce que vous cherchez ? » s’enquit l’orgoth. « Je n’ai pas de trésor, et même mes esclaves ne sont plus que des os maintenant. »

Garrus, peut-être inconsciemment, jeta un coup d’oeil au cadavre ratatiné du chien de mer devant le trône. L’acte n’échappa pas à l’attention de l’orgoth.

« Bien sûr, tu cherches la lame », dit-il, en plaçant une main sur la pognée de Harrowdim. « Je ne vous la cacherai pas. » Il saisit l’épée par la lame et la tendit poignée en avant. « Avancez et prenez-l. »

« Ma maîtresse s’intéresse grandement à Harrowdim », admit Garrus, tout en s’éloignant du trône.

« Non ? » dit le guerrier, en souriant. «  Et vous ? » Il pointa la poignée vers Elyshyvah. Elle ne dit rien et resta simplement immobile.

Le guerrier remit l’épée sur ses genoux et s’installa à nouveau sur son trône. « Cela fait de longue années que personne de digne n’est venu chercher l’épée », dit-il.

« Que voulez-vous dire ? » Demanda Garrus.

« La lame s’est alourdie au fil des années. J’aurais tendance à la transmettre à quelque de digne de sa puissance », déclara le guerrier. « Peut-être l’un de vous. »

« Comment est-ce que je – vous – prouvons notre valeur ? » Demanda Garrus, jetant un coup d’oeil à Elyshyvah. Elle n’aima pas ce qu’elle vit dans les yeux de l’homme.

Le guerrier orgoth sourit, montrant une rangée nette de dents blanches parfaites. « Vous survivrez. »

* * *
« Modifié: 26 août 2020 à 23:46:50 par elric »
Citation de: Maître Yoda
Trop gentil tu seras, dans le côté obscur tu l'auras.

Si vous constatez des fautes d'orthographe et/ou de conjugaison, des phrases à remanier pour une meilleur compréhension.
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Re : LANDES NOUEUSES – TOMBE D’UN IMMORTEL
« Réponse #1 le: 16 août 2020 à 22:58:29 »
Grigor Orlov arracha sa hache du cadavre du guerrier nyss à ses pieds. L’adversaire s’était montré plus coriace qu’il ne l’avait prévu, résistant au tir du bouclier canon de son Vanguard avant de se jeter au corps à corps avec son épée. Il avait été forcé de s’occuper de la créature avec sa hache runique. L’autre nyss de la clairière avait disparu dans al forêt morte, et Grigor n’avait pas pris la peine d’envoyer un membre de sa Garde des Glaces à sa poursuite.

Devant l’immense tumulus, ses alliés se tenaient au-dessus des cadavres mutilés de deux humains – des marins, à leur apparence, un peu comme ceux qu’il avait vus à bord des navires corsaires opérant à partir de Cinq-Doigts et d’autres ports peu recommandables. Les haches des trollkin s’étaient rapidement occupées des pirates, mais un guerrier trollkin avait également été tué. Grigor supposait qu’une balle de pistolet dans le cerveau était une blessure dont même l’incroyable résistance du trollkin ne pouvait se remettre.

« Reconnaissez-vous ces hommes ? » Demanda une trollkin, se détachant des autres guerriers et approchant de Grigor. C’était Janissa Stonetide, une façonneuse de runes trollkin réputée. Elle était grande et bien formée, avec la peau pâle d’un chaman ou d’un sorcier de son espèce. Elle portait une jupe robuste faite de pierres gravées de runes par-dessus de la maille. Sa seule arme était une immense pioche de guerre, sa tête d’acier gravées de runes supplémentaires.

« Celui-là a la marque de Thamar sur son bras. » Grigor désigna l’un des humains morts avec un grand tatouage en forme de trois flèches. « Je pense qu’ils dépendent de Fiona la Noire. »

« Alors ce que la vieille a dit est vrai », dit Janissa. « Ils cherchent Harrowdim. »

« C’est ce qu’il semblerait », dit-il. « Mais qu’en est-il de cette créature bizarre ? » Il fit un signe au nyss mort à ses pieds.

« Nyss corrompu par un dragon » répondit Janissa. « Mon peuple a combattu ces abominations dans le nord. C’est étrange, cependant, d’en voir si loin dans le sud, et encore plus étrange qu’ils œuvrent avec ces pirates. Je n’ai jamais entendu dire qu’ils s’alliaient avec qui que ce soit. »

En tant que seigneur koldun, Grigor possédait une connaissance approximative des nyss déformés, bien qu’il n’en ait jamais vu auparavant. Il savait que leurs chefs étaient de puissants sorciers qui pourraient être intéressés par un artefact orgoth.

« Deux hommes et deux nyss, qui montent la garde », dit-il. « Les autres doivent être en bas. »

Janissa hocha la tête. « Probablement. »

Grigor regarda autour de la clairière. Elle se dressait tel une immense cicatrice au milieu de la grande forêt, un espace de terre aride de 200 verges de diamètres. Le tumulus orgoth se tenait au milieu de la clairière, entouré de six piliers incrustés de runes. « Ces colonnes », demanda-t-il, « quel est leur but ? »

« Mon peuple les a placés ici il y a des siècles pour contenir le mal s’y trouvant », répondit Janissa. « Mais leur pouvoir s’estompe. »

« Pouvez-vous le restaurer ? » Demanda Grigor. Zevana Agha lui avait demandé d’aider Janissa, même si elle ne lui avait pas dit pourquoi. La compétence de la chamane trollkin à créer et réparer les protections runiques de son peuple pourrait être une des raisons.

« Je peux, mais nous devons éliminer les humains et les nyss ci-dessous », dit-elle. « Nous ne pouvons pas leur permettre de libérer le mal dans cette tombe. »

« Assez diabolique pour inciter la Vieille Sorcière à agir est certainement digne de crainte ou de respect », dit Grigor. « Le fait qu’elle vous ait impliqué, vous et votre peuple, en dit long. »

Janissa se renfrogna. « Nous ne devons rien à la vieille. Nous avons écouté ses paroles parce que mon peuple comprend ce mal mieux que quiconque », dit-elle, sa voix teintée de colère.

En vérité, Grigor ne savait pas pourquoi la Vieille Sorcière avait choisi de contenir le mal dans la tombe orgoth plutôt que le revendiquer. Il avait servi le Kommandeur Koldun Zerkova pendant plus d’une décennie, pillant des tombes pas différentes de celle-ci, à la recherche d’artefacts orgoth. L’Alliance des Seigneurs Gris s’était emparé de centaines d’objets dangereux, exploitant leur pouvoir pour servir la Mère Patrie. En quoi celle-ci était-elle différente.

« Très bien », répondit Grigor. « Mais la raison pour laquelle je suis ici est que votre peuple n’a pas réussi à garder cet endroit secret et sécurisé. » Il désigna l’énorme dalle de granit située à côté de l’entrée du tumulus. Il était évident qu’elle avait déjà scellé le tombeau.

Le regard renfrogné de Janissa s’est accru. « Je n’ai pas envie de discuter avec vous, humain. Vous ne comprenez peut-être pas la menace que représentent les horreurs de cette tombe, mais souvenez-vous ce que la vieille a dit. »

La Vieille Sorcière avait quitté leur compagnie peu de temps après avoir quitté le village des trollkin. Avant de disparaître dans les Landes Noueuses, cependant, elle avait pris à part Grigor et Janissa et avait chuchoté instamment : « Les vards faits pour contenir les morts ne sont pas des obstacles pour les vivants. »

« Je me souviens », dit Grigor. « L’avertissement de la Vieille Sorcière suggère que nous devons stopper ceux qui voudraient piller cette tombe. Œuvrons dans ce sens. »

« Je suis d’accord », dit Janissa, qui se retourna pour rejoindre les six guerriers trollkin se tenant près de l’ouverture du tumulus. Grigor accrocha sa hache runique à sa ceinture puis rassembla ses propres hommes, huit membres de la Garde des Glaces triés sur le volet pour leur bravoure et leur loyauté. Il aurait préféré un détachement de vagabonds maudits, mais ils étaient trop loin en territoire cygnaréen pour risquer d’utiliser des actifs aussi imprévisibles. Au lieu de cela, le kommandeur Koldun lui avait confié la charge de l’un des warjacks Vanguard remis à neuf qu’elle avait revendiqué durant la conquête du Llael. Il savait qu’avec le warjack, il pouvait faire face à toutes les menaces que les trollkin et la Garde des Glaces ne pouvaient affronter. Heureusement, l’entrée du tumulus et le tunnel en dessous semblaient assez grands pour accueillir l’imposante machine.

« Le Vanguard et moi passerons en premier », dit Grigor à Janissa lorsqu’il rejoignit ses hommes devant l’ouverture. « Nous devrions être capables de repousser une embuscade – ou de mener une retraite protégée, si nécessaire. »

« D’accord », dit Janissa, en prenant une torche à l’un de ses guerriers. La Garde des Glaces de Grigor distribuait également des torches entre eux. Il ne prit pas de torche ; sa hache runique émettait un doux rayonnement bleu suffisamment brillant pour révéler le chemin.

« Viens », dit Grigor au Vanguard à ses côtés. Il n’avait la capacité de sorcellerie à se lier au cortex d’un warjack, mais il avait été entraîné à commander les imposantes machines en employant des ordres verbaux et des gestes. Le Vanguard répondit immédiatement, baissant son bras droit de sorte que son énorme arme d’hast soit tenu parallèlement au sol ; il le suivit ensuite dans l’inconnu.

* * *

Janissa s’accroupit en descendant le passage de pierre incliné, essayant de garder hors de l’énorme épais nuage noir qui s’échappant de la cheminée du warjack. Ils se déplaçaient ni rapidement, ni furtivement ; étant donné qu’ils n’étaient pas les premiers à s’immiscer, ils savaient que les gardiens du tombeau devaient déjà être réveillés.

Les murs du tunnel étaient composés de pierre du sol au plafond, et elle remarqua des runes trollkin gravées en divers endroits. Plutôt que de servir de protections eux-mêmes, ces symboles s’accordaient avec les glyphes inscrits sur les piliers ci-dessus pour renforcer la magie et l’attirer plus loin dans la tombe. Entretenir les runes était une responsabilité confiée à un puissant façonneur de runes à chaque génération. Janissa avait récemment reçu l’honneur de ce devoir – ainsi que la sinistre connaissance des raisons pour lesquelles les protections étaient nécessaires.

La légende d’Harrowdim était connue depuis longtemps par son clan. Les orgoth avaient apporté l’épée sur ces rives il y a près de mille ans, et elle et son porteur avaient semé la destruction à foison dans l’Immoren occidental. Harrowdim n’était simplement pas une lame enchantée. Elle aurait permis à son porteur de tromper la mort et de se relever après l’inhumation. Nul doute que le seigneur orgoth qui l’avait détenu attendait-il en bas, attendant son heure pour être libéré et reprendre sa campagne d’asservissement et de conquête. Les orgoth avaient enterré leur chef avec son épée après qu’il fut tombé au combat, mais son peuple avait bâti les protections qui le piégeaient là après avoir appris qu’il se relèverait. Malheureusement, les protections n’éloignaient pas les hommes stupides en quêtes de richesses et de la puissante magie orgoth.

Heureusement, Janissa n’était pas la seule à se méfier du mal contenu ci-dessous. Quand la Vieille Sorcière était apparue soudainement dans son village avec Grigor et ses hommes, elle avait pensé qu’ils avaient l’intention d’attaquer. La vieille femme, cependant, avait simplement souhaité lui parler, bien que Grigor ait fait la majeure partie de la conversation.

Il lui avait dit que Fiona la Noire cherchait ce qui reposait dans la tombe et avait envoyé un de ses plus puissants subalternes thamarites pour voir la tâche accomplie.

Janissa doutait qu’elle aurait pris Grigor au mot si la Vieille Sorcière n’avait pas été présente. Son ordre était connu pour fondre comme des vautours sur les ruines orgoth, s’emparant de tout ce qu’ils pouvaient trouver pour être employé comme arme. Une telle pensée était une folie, comme elle et son peuple le savaient depuis longtemps : rien de ce que les orgoth avent laissé derrière eux n’était sans souillure.

Ramenant son attention sur le passage. Janissa vit qu’il s’ouvrait dans un vaste espace éclairé par une étrange lumière jaune projetée par un foyer central. Alors qu’elle et le reste de ses trollkin se déplaçaient dans l’espace, elle vit qu’ils n’étaient pas seuls.

À l’extrémité nord de la chambre, au-delà du foyer, une grande figure vêtue d’une armure orgoth se prélassait sur un trône sculpté dans de la pierre noire reposant sur une estrade surélevée. Devant lui se tenait un groupe de nyss corrompus, armurés de cuir bouilli et armés d’épées courtes et d’arcs recourbés. En face d’eux se trouvait un groupe d’humain non armuré, armés de pistolets de gros calibre et de diverses armes de poing. Au bruit des nouveaux arrivants, les plus proches se tournèrent et relevèrent leurs armes avec méfiance.

Janissa scruta les deux groupes pour repérer leurs chefs respectifs. Ce ne fut pas difficile. Une grande femme nyss avec un bâton à lames se tenait parmi les siens, qui l’entourait de manière protectrice. Les chiens de mer de Fiona semblaient tous similaires à ses yeux, mais l’un des humains n’était vêtu que de noir et portait la marque de Thamar visible sur sa personne, une démonstration impudente de ce qui devait être le prêtre de Fiona.

« Voici arrivé le moyen par lequel vous vous montrez digne », dit le guerrier sur le trône, sa voix perçante de baryton retentissant sur les murs de la chambre en pierre. Il pointa une massive épée dans leur direction, dont la lame brillait d’un vert virulent. L’orgoth était d’une stature incroyable et semblait physiquement égal au plus grand trollkin du groupe de Janissa. Son armure était ornée de visages démoniaques et aux regards méchants qui ajoutaient une qualité bestiale à son apparence déjà imposante. Encadré par son casque à cornes, son visage était assez humain, ses traits belliqueux et quelque peu prédateurs. Ses yeux, cependant, étaient résolument inhumains – des orbes complètement noire qui scintillaient avec voracité à la lumière du feu. Janissa n’avait jamais vu Harrowdim en personne, mais il ne faisait guère de doute dans son esprit que l’épée dans la main droite de l’orgoth était l’infâme arme.

Elle sentit la tension croître dans la salle et se tourne vers Grigor pour l’avertir.

Ses paroles, cependant, furent totalement noyées par le boom fracassant du canon bouclier du Vanguard suivi du tonnerre saccadé des tromblons de la Garde des Glaces. La volée frappa les chiens de mer, et près de la moitié d’entre eux tombèrent avant l’assaut.

Le chaos éclata dans la chambre. Les chiens de mer survivant se dispersèrent, vidant leurs pistolets en courant. Les nyss corrompus emboîtèrent le pas, reculant vers le bord extérieur de la chambre. Ils tenaient leurs arcs en main mais n’avaient pas encore décoché.

« Tuez-les tous ! » Cria Grigor en lavant sa hache runique. Les balles de pistolets sonnèrent sur la coque du Vanguard, mais ne firent que peu de dégâts. La Garde des Glaces s’entassa derrière le warjack et se dépêcha de recharger leurs tromblons.

Une flèche nyss siffla par-dessus la tête de Janissa. Les nyss et leur cheffe se déplaçaient autour du périmètre de la chambre, tirant à l’arc à l’arrivée.

« Boucliers levés, les gars ! » Cria Janissa en s’emparant de sa pique, Fendeuse Tellurique, à sa ceinture. Les guerriers des kriels répondirent immédiatement en formant un bloc compact qui la maintenait en son centre. Les flèches commèrent cliqueter sur les boucliers trollkin alors que les guerriers avançaient.

Janissa jeta un rapide coup d’œil à Grigor pour voir que lui et ses hommes avaient également commencé à avancer. Les tirs de fusils et de canon couvrirent à nouveau tous les autres bruits dans la chambre, alors que la Garde des Glaces et le Vanguard tiraient à nouveau sur les chiens de mer.

Les nyss n’avaient pas abandonné leurs arcs, alors même que Janissa et les guerriers des kriels avançaient. En fait, ils reculaient et se dirigeaient vers la gauche, comme s’ils essayaient de contourner les trollkin. L’attention de leur chef semblait fixée sur quelque chose d’autre que la bataille. Alors que ses partisans la couvraient en envoyant des flèches sur le flanc de la Garde des Glaces le plus proche, elle se précipita vers l’un des squelettes sur le sol proche du trône et attrapa un livre. Le livre et le squelette semblaient tous deux entourés d’une fine couche de givre durci, mais elle le libéra et sourit. Faisant un signe de tête à ses subordonnés, la femelle nyss pointa vers l’entrée. Puis son regard croisa celui de Janissa ; elle leva son bâton et les archers cessèrent de tirer.

Janissa posa une main sur le trollkin devant elle. « Attends », dit-elle. Les trollkin s’arrêtèrent, bien qu’ils tiennent toujours leurs boucliers haut. Janissa fixa la cheffe nyss et plaça sa pique sur son épaule. Elle espérait que tenir l’arme dans une position neutre transmettrait le message qu’elle voulait : je n’essaierai pas de vous tuer si vous nous rendez la pareille. Il semblait que celle-ci n’était impliquée que de manière accessoire dans la menace de réveiller le mal présent ici.

La femelle nyss hocha la tête et baissa son bâton ; de même, les guerriers nyss baissèrent aussi leurs arcs puis se dirigèrent vers le passage menant à la surface.

« Laissez-les partir, les gars », dit Janissa. « Nous avons des préoccupations plus immédiates. » Elle se retourna pour voir que la plupart des chiens de mer avaient été abattus par la Garde des Glaces ou démembrés par l’arme d’hast du Vanguard. En raison de l’attaque rapide de son groupe, un seul soldat khadoréen avait succombé aux pistolets des chiens de mer, bien que plusieurs autres aient été blessés superficiellement.

Janisssa et ses trollkin se rapprochèrent du trône tandis que Grigor et le thamarite se battaient, les armes à la main.

Une seule bataille avait lieu devant le trône orgoth. La hache runique de Grigor brillait d’une lumière bleue éclatante ; et le poing droit du thamarite crépitait d’une flamme ébène alors qu’ils décrivaient de cercle avec un empressement méfiant. Le prêtre lança soudainement une explosion de flamme noire sur Grigor, mais le Vanguard se déplaça rapidement pour intercepter la flamme brûlante. La chaleur infernale lécha avidement le bouclier du warjack, faisant fondre partiellement l’alliage en acier. C’était tout ce dont Grigor avait besoin pour débuter. Il chargea en avant en contournant le Vanguard, attaquant le prêtre. Le thamarite recula désespérément et Janissa l’entendit marmonner frénétiquement un effroyable enchantement. Malheureusement pour lui, la noire prière mourut inachevée sur ses lèvres. Grigor venait d’abattre sa hache d’un puissant coup et fendit le crâne du prêtre jusqu’aux dents dans un jet de sang et de matière cérébrale. L’homme s’effondra au sol, arrachant la hache de Grigor de sa prise.

Grigor posa une botte sur la poitrine du thamarite mort, se pencha et arracha sa hache du cadavre. Il se releva alors et se tourna vers le guerrier orgoth sur le trône.

« Je sens le pouvoir en toi », dit le guerrier en pointant Harrowdim vers Grigor. « Et toi. » Il déplaça l’épée vers Janissa. « Lequel d’entre vous est le plus digne ? Lequel d’entre vous a la force de manier Harrowdim. »

Janissa ignora l’orgoth et traversa le court espace entre elle et Grigor. Remarquant ses yeux fixés sur la grande lame nue, elle sentit les premières vrilles de terreur se frayer un chemin dans ses entrailles. « Grigor », dit-elle. « Nous devons partir. »

Le khadoréen détourna ses yeux d’Harrowdim pour regarder Janissa. « Non, je ne pense pas être prêt à partir pour l’instant », dit-il d’une voix plate et creuse. Alors que son regard vacillait entre elle et le guerrier orgoth, Grigor posa une main sur la poignée de sa hache runique et dit : « Tu devrais rejoindre ta parenté. »

« Ne soyez pas idiot », murmura-t-elle.

« Éloignez-vous de moi, Janissa », dit Grigor d’un ton brusque. « Maintenant. »

Le ton mordant du khadoréen poussa certains de ses hommes à pointer leurs fusils dans sa direction ; en réponse, ses guerriers des kriels s’avancèrent derrière elle. Elle lava une main pour les arrêter. « Ne faites pas ça, Grigor », dit-elle en reculant vers les siens. « Nous pouvons encore partir et achever notre tâche. »

Grigor ignora son appel et s’avança vers le trône. « Comment puis-je prouver que je suis digne ? » Demanda-t-il.

Le guerrier orgoth sourit. « Ah, un homme avec de la pierre et du feu dans son coeur », dit-il. « Si vous souhaitez revendiquer la lame, vous devez être le seul digne suppliant devant ce trône. » Le guerrier regarda Janissa. « Actuellement, il y en une autre. »

Grigor se tourna vers la façonneuse de rune, ses yeux, des yeux gris silex dépourvu de raison ou de compassion. Connaissant le combat ; Janissa sentait monter crescendo la tension toujours prélude à la violence.

« Tuez-les », ordonna Grigor, et les fusils des Gardes des Glaces pivotèrent à l’unisson pour viser Janissa et ses guerriers. S’attendant à cela, Janissa pu faire appel aux dons de Dhunia avant que les doigts des humains ne puissent se crisper sur leur gâchette. En projetant sa volonté s’enfoncer dans la pierre à ses pieds, elle ordonna aux os de Dhunia d’obéir à ses ordres. La pierre se déforma et une marée de terre et de gravats s’éleva devant elle telle un mur imperméable. Les tromblons furent déchargés l’instant d’après, leurs munitions en plomb s’écrasant inoffensivement contre le mur de pierre.

Le sort était éprouvant, et Janissa laissa le mur s’effondrer dès que le danger immédiat fut passé. Mais celui lui avait offert un avantage : les humains n’auraient pas le temps de recharger leurs armes avant d’être forcé d’affronter ses guerriers des kriels au corps à corps.

Janissa agrippa Fendeuse Tellurique et chargea en avant. N’ayant plus besoin d’encouragement, ses guerriers des kriels la suivirent avec un chœur de cris de guerre féroce. Alors que sa parenté se dirigeait vers la Garde des Glaces, Janissa choisit une autre cible, se dirigeant tout droit vers Grigor et la forme métallique de son Vanguard.

Elle était à la fois forte en magie et en art de la guerre, mais aucun trollkin sans la puissance de Borka Pourfendeur de Fût ou de Madrak Cuirdefer ne pouvait espérer battre un koldun et un warjack en combat singulier. Ce n’était pas son but ; elle avait simplement besoin de tenir Grigor occupé pendant que ses guerriers des kriels s’occupaient de la Garde des Glaces.

Grigor la vit venir et aboya un ordre au warjack. Le Vanguard se retourna vers elle, pointant son canon court dans sa direction. Une fois de plus, elle invoqua le pouvoir de la terre et de la pierre pour la défendre. Le sol de pierre trembla devant alors qu’elle tendait une main, ressentant la magie qu’elle avait libérée comme une chose tangible. Fermant son poing, elle arracha un énorme morceau de pierre du sol puis lança sa main vers Grigor et son warjack, propulsant le rocher vers l’avant.

Grigor plongea de côté alors que la masse de terre et de roche s’écrasait sur le Vanguard avec un énorme fracas de pierre fendue et de métal tordu. Le warjack fut projeté au sol par l’impact. Bien que son bouclier ait encaissé le plus gros du choc, Janissa pu constater que son pavois était endommagé. Maintenant, presque au-dessus de la machine, elle sauta par-dessus le bouclier du Vanguard et enfoncer Fendeuse Tellurique d’un coup formidable. Le bec en acier affûté de l’arme perça le châssis du Vanguard juste au-dessus de sa tête, pénétrant l’ingénierie délicate alimentant le monstre. Une pluie d’étincelles explosa autour de l’arme de Janissa, suivie d’un liquide noir et visqueux. Le warjack frissonna et elle fut certaine d’avoir touché quelque chose de vital pour son fonctionnement.

Janissa dégagea sa pique et sauta du châssis du warjack à la recherche de Grigor. Il se tenait à une douzaine de pas, la hache runique à la main, du sang coulant sur son visage à cause d’une entaille sur son front. Elle se prépara à invoquer un autre marteau de pierre. Grigor vit ce qu’elle faisait et leva son poing en l’air. « Lève-toi ! », cria-t-il. Elle ne comprit l’ordre avant d’entendre le grincement du métal derrière elle. Janissa se retourna pour voir que le Vanguard s’était relevé et envoyait vers elle la grande lame en croissant de sa hallebarde vers elle. Elle ramena Fendeuse Tellurique dans une tentative désespérée de parer le coup. L’arme du warjack s’écrasa sur sa pique, l’arrachant presque à sa prise et envoya une poussée de douleur dans son bras alors que les os de son poignet se brisaient comme des brindilles sous l’avalanche.

Gigor choisit ce moment pour attaquer, en franchissant la distance qui les sépare avec une vitesse surprenante. Se retournant pour contrer sa charge, elle fut forcée de passer Fendeuse Tellurique dans sa main gauche. Alors que la hache couverte de runes de Grigor s’écrasait, elle sut qu’elle ne pourrait pas la dévier complètement.

La trollkin fit tomber sa pique pour attraper la hache de Grigor, mais il faut plus rapide, et la lame d’acier se précipita sous sa garde et mordit dans la jupe de pierres runiques suspendues à sa ceinture. Une poignée de pierre se brisa, et la hache pénétra dans la maille qu’elle portait en dessous, entaillant la chair de sa cuisse gauche.

Janissa cria d’agonie et battit en retraite, arrachant la hache de son corps au passage. Grigor se précipita à nouveau vers l’avant et l’attaqua avec une lourde botte, balayant ses pieds. Janissa s’écrasa au sol et l’air de ses poumons fur expulsé sous le brutal choc. Elle roula et essaya de ramper, mais ne réussit pas à aller bien loin.

« Abandonne ! » cria Girgor à Janissa, et elle sentit la mortelle pointe de l’hallebarde du Vanguard au bas de son dos. Elle voulut hurler son mépris, mais elle ne pouvait inspirer suffisamment d’air dans ses poumons pour crier.

Les bruits de lutte dans la pièce commencèrent à s’estomper, Janissa supposa que ses guerriers des kriels avaient rompu leur mêlée avec la Garde des Glaces de peur qu’elle ne soit tuée. Sentant la pression de l’arme du Vanguard s’éloigner de son dos, Janissa se retourna, ignorant la fulgurante douleur dans son bras gauche et sa cuisse. Le sol de pierre sous elle était recouvert de sang et elle espéra que sa robustesse naturelle arrêterait le saignement avant qu’elle ne perde conscience.

Elle vit que Grigor s’était détourné d’elle pour se tenir devant le trône. Le guerrier orgoth tenait Harrowdim entre ses bras, sa poignée faisant saillie sur ses canons d’avant-bras. L’horreur la parcourue lorsqu’elle réalisa ce qui allait se passer.

« Je suis victorieux », déclara Grigor. « Donne-moi la lame. »

L’orgoth s’avança. « Alors, tu l’es », dit-il, son visage un masque de joie prédatrice. « Et ainsi je le ferai. » La poignée de l’épée n’était plus qu’à quelques pouces du visage du khadoréen.

« Grigor », parvint à croasser Janissa. « Ne faites pas cela. »

Le khadoréen agita la tête pour regarder autour, son visage tordu de rage et d’un désir si puissant qu’il était presque palpable. « L’épée ira à l’Alliance », dit-il. « Nous utiliserons son pouvoir pour apporter la défaite à nos ennemis et la gloire à la patrie. »

« Prenez-la et ces choses seront à toi », dit le guerrier orgoth. « Prenez-la et faites partie de la légende d’Harrowdim. »

« Oui », dit Grigor. Il se lécha les lèvres et laissa sa main planer sur la poignée de la grande lame. « J’ai contraint nombres de ces artefacts à ma volonté ; celui-ci aussi me servira. » Janissa cru entendre un moment d’hésitation dans sa voix, voire de la peur, et elle espéra que celui lui ferait retrouver la raison. Cette lueur d’espoir fut soufflée par le vent du désespoir, alors que la main de Grigor serrait la poignée d’Harrowdim.

« Non, non, non », souffla Janissa en se levant.

La pièce fut soudainement baignée d’une étrange lueur verte alors que les visages se tordant le long de la lame commençaient à exhaler une terrible luminosité. La lumière passa de la lame au corps de Grigor, le baignant d’un vert vénéneux.

Le guerrier orgoth recula et Janissa vit quelque chose à laquelle elle ne s’était attendue. Il s’effondra sur son trône et chuchota quelque chose dans une langue qu’elle ne reconnaissait pas, la lassitude et le désir profond des mots ne faisant aucun doute. Il s’affaissa dans son armure alors que sa chair commençait à fondre devant ses yeux, s’écartant de ses os dans une marée semi-liquide. En quelques secondes, il ne resta plus qu’un tas d’os gluants et une armure antique. L’effroyable force qui avait maintenu le guerrier orgoth en vie durant des siècles l’avait quitté et résidait maintenant en Grigor.

Janissa avait lentement reculé vers les trois guerriers des kriels ayant suvécu au combat avec la Garde des Glaces. Les humains, cependant, demeuraient figés, regardant leur chef en étant de choc. La lueur de la lame d’Harrowdim s’était éteinte. Laissant Grigor apparemment indemne. Le changement était subtil, mais quand Janissa le remarqua, elle eut une terreur malsaine : les yeux de Grigor, autrefois d’un gris acier dur, étaient devenus des orbes scintillants d’onyx noir brillant d’un intellect malin qui n’était pas le sien.

Janissa entendit à nouveau les paroles de la Vieille Sorcière résonner dans son esprit, et leur signification devint soudainement effroyablement clair : les runes trollkin avaient gardé le mal emprisonné parce que l’orgoth avait cessé d’être un être vivant depuis longtemps. À travers à la lame, sa volonté était transmise à un être vivant. Grigor Orlov ne se serait pas soumis à la magie de garde, et le mal qui le possédait serait à nouveau libre dans le monde.

Harrowdim animerait Grigor si Janissa parvenait à terrasser – et à le soumettre au pouvoir des runes. Mais ce n’était pas une option, ; elle n’avait pas la puissance pour une telle tâche. Une unique option demeurait, si elle possédait encore la force de le faire. Atteignant enfin ses guerriers des kriels, elle se pencha sur l’un deux pendant un moment avant de donner l’ordre. « Nous devons partir », dit-elle. « Maintenant ! »

Les trollkin commencèrent à se déplacer en direction du passage vers la surface. Sans lumière, ils devraient se diriger dans le noir par le seul toucher. Janissa se retourna vers Grigor juste avant qu’ils n’entrent dans le couloir et vit que les Gardes des Glaces restants s’étaient regroupés autour de lui, leurs tromblons visant leur ancien chef. Il n’avait pas bougé depuis qu’il avait pris possession de l’épée – peut-être qui lui fallait un certain temps pour que sa volonté soit entièrement engloutie – mais ensuite, comme s’il sentit son regard sur lui, Grigor leva Harrowdim d’une main et la pointa sur elle. Son visage arborait un rictus de plaisir malveillant que la remplit d’une peur des plus terribles.

« Courez ! » Hurla-t-elle après les guerriers des kriels, et ils se précipitèrent sans tenir compte des ténèbres. Une fuite aveugle et effrayante vers la surface s’ensuivit, et bien qu’ils aient parcouru le passage en moins d’une minute, cela sembla prendre beaucoup plus de temps. Janissa continuait de regarder par-dessus son épaule en s’attendant à voir une lumière gangreneuse devenir plus brillante à mesure que la chose dans la tombe les poursuivait avec joie dans le monde d’en haut. Mais elle ne vint jamais. Les trollkin sortirent du tombeau et se dirigèrent vers le soleil radieux et clément de la fin de l’après midi.

Janissa et les guerriers des kriels s’effondrèrent sur la terre grise sans vie entourant le tumulus, à bout de souffle et presque fous de terreur. Mais ce n’était pas fini. Janissa se remit debout et se dirigea vers l’effroyable entrée. Enfonçant Fendeuse Tellurique dans le sol, elle ferma les yeux et laissa sa volonté imprégner la terre sous elle, sentant chaque roche, chaque motte de terre et chaque grain de sable. Elle plongea plus profondément, dans les os de la terre, et là, elle s’empara des énergies primales qui bouillonnaient dans les profondeurs. Janissa puisa sa force dans la puissance qu’elle ressentait dans les colonnes gravées de runes autour d’elle, chacune imprégnée du savoir et de l’habilité de ses prédécesseurs datant de plusieurs siècles.

Cela débuta par une légère secousse, un profond tremblement qui déplaça la terre meuble dans la clairière. Alors que Janissa continuait de déverser sa volonté dans le sol, le tremblement se transforma en un grondement grave qui fit s’entrechoquer les arbres morts comme du petit bois ramassé pour un feu – mais elle ne céda pas, même pas quand le sol devant elle commença à bouger et à se tordre comme des vagues sur une mer de pierre. Finalement, quand ses forces furent presque épuisées, le tumulus orgoth qui avait été si habilement élevé succomba enfin aux puissantes forces qu’elle avait rassemblées contre lui. Le tumulus s’affaissa puis s’effondra, une vague de poussière et de pierre explosa de l’épicentre.

Janissa tomba à genoux, épuisée, et observa la réaction en chaîne qu’elle avait déclenchée. Le sol continuait à se soulever, déracinant les arbres chancelants autour de la clairière et les projetant en l’air pour s’écraser sous une pluie de poussière et de bois pourri. Bien que les piliers runiques autour du tumulus aient été profondément enfouis, les violentes secousses les ont arrachés. Les guerriers des kriels derrière Janissa ont plongèrent au sol et levèrent le bouclier contre la pluie de débris.

Finalement, le tremblement se calma. Une fois la poussière retombée, Janissa vit que le tumulus était presque détruit. Il n’était plus qu’une simple butte, l’ouverture, sur le côté, détruite et entièrement scellée. Elle se leva en tremblant, grimaçant à la douleur de ses blessures, et se dirigea lentement vers le pilier le plus proche. Il gisait sur le côté, fissuré en deux, et quand elle tendit la main pour le toucher, elle ne put sentir le vrombissement familier de la magie des sceaux.
Les paroles de la Vieille Sorcière lui revinrent à l’esprit : Les protections conçues pour contenir les morts ne sont pas des obstacles pour les vivants.

Gigror était-il toujours là-bas, enterré sous des tonnes de terre et de roches, mais maintenu en vie par Harrowdim jusqu’à ce qu’il puisse se frayer un chemin ? Et si l’effondrement n’était pas suffisant pour contenir ce mal ? Janissa regarda à nouveau le pilier détruit devant elle ; de nouvelles runes devraient être sculptées afin de contenir les vivants comme les morts. Elle avait beaucoup de travail à faire.

Source
« Modifié: 26 août 2020 à 23:47:15 par elric »
Citation de: Maître Yoda
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Re : LANDES NOUEUSES – TOMBE D’UN IMMORTEL
« Réponse #2 le: 17 août 2020 à 00:05:27 »
Miam !
Le doute détruit beaucoup plus de rêves que l'échec.

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Re : LANDES NOUEUSES – TOMBE D’UN IMMORTEL
« Réponse #3 le: 17 août 2020 à 08:57:21 »
Merci ! :)
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Re : LANDES NOUEUSES – TOMBE D’UN IMMORTEL
« Réponse #4 le: 25 août 2020 à 00:19:19 »
Morceaux 3 et 4
Citation de: Maître Yoda
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Re : LANDES NOUEUSES – TOMBE D’UN IMMORTEL
« Réponse #5 le: 25 août 2020 à 12:14:44 »
La suite ! La suite ! La suite !... ;D
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Re : LANDES NOUEUSES – TOMBE D’UN IMMORTEL
« Réponse #6 le: 25 août 2020 à 21:12:30 »
5ème morceau

La suite ! La suite ! La suite !... ;D
Que ton voeux soit exhaussé Titi.

Dernier morceau demain
Citation de: Maître Yoda
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Re : LANDES NOUEUSES – TOMBE D’UN IMMORTEL
« Réponse #7 le: 26 août 2020 à 23:49:27 »
Texte en entier.
Bonne lecture  :)
Citation de: Maître Yoda
Trop gentil tu seras, dans le côté obscur tu l'auras.

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Re : LANDES NOUEUSES – TOMBE D’UN IMMORTEL
« Réponse #8 le: 27 août 2020 à 00:14:29 »
Merci pour le tout ! ;D
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